Mais que vient faire la biographie de Suzy Solidor sur les étagères de l’Aérobibliothèque ? D’abord, qui était cette Suzy Solidor dont le nom est inconnu du Larousse alors que ceux de Cocteau, Rostand, Arletty, Trenet, Laurencin, etc. sont quasiment inscrits au patrimoine français. Cet ouvrage de Marie-Hélène Carbonel, fort bien écrit, nous plonge dans le Paris des Années folles, une époque artificielle où tout est fait pour oublier et exorciser les années de Guerre ; un Paris où il est possible d’afficher son homosexualité sans craindre le rejet des familles ancrées dans les convenances.
Suzy Solidor, fille illégitime d’un descendant du grand Surcouf et d’une servante, née près de Saint-Malo alors que l’exposition universelle s’achève, rêve d’horizons lointains. Elle attendra l’âge de sa majorité pour larguer les amarres et jeter l’ancre à Paris chez une antiquaire lesbienne qui l’initiera, tout à la fois, aux plaisirs de la chair et à la vie mondaine.
Elle ouvre ensuite sa propre boutique, puis un cabaret où le Tout-Paris se bouscule pour l’entendre chanter et clamer des vers de ses amis poètes.
Joseph Kessel est l’un des habitués de son cabaret et, en 1933, lui fait rencontrer Jean Mermoz alors qu’il est reçu en vainqueur de l’Atlantique Sud par une foule en liesse. Entre le séduisant pilote et la fille qui n’aimait que les femmes, le coup de foudre semble immédiat. Suzy Solidor deviendra le port d’attache de l’aviateur lors de chacune de ses escales parisiennes jusqu’à sa disparition en 1936, dans les eaux de l’Atlantique Sud.
Pour les aéronautes, l’intérêt de cette biographie se borne donc aux quelques passages dédiés à l’étrange relation qu’entretenait un pilote tel que Mermoz avec une homosexuelle, ni belle, ni encore jolie, n’en démontre la multitude de portraits brossés, tapissant les murs du cabaret de l’artiste, et présentés dans cet ouvrage en deux cahiers photos.
Corinne Micelli
332 pages, 15 x 24 cm, broché