Le premier diptyque de Tanguy et Laverdure Classic était un peu particulier : il ne s’agissait pas d’une histoire originale, mais d’une adaptation du roman de Jean-Michel Charlier, L’avion qui tuait ses pilotes, écrit au tournant des années 1970 et présentant les intrigues autour des premières ventes du Dassault Mirage F1.
Pour son premier scénario « néo-rétro », Patrice Buendia s’est associé à Hubert Cunin, et ils sont remontés quelques années plus tôt : nous sommes cette fois en 1964, et la Suisse prépare l’achat de Mirage III pour remplacer ses Vampire et Hunter. Vous l’aurez compris, l’intrigue tourne autour de l’affaire des Mirage, un scandale mémorable pour la très scrupuleuse confédération alpine ; une bonne occasion de mêler à nos pilotes des hommes politiques, des militaires de haut rang, des espions et une femme fatale. Le scénario est touffu, plutôt dense, parsemé de gags laverduriens et de scènes d’action épiques. Bref, il rappelle ceux que Charlier aimait à écrire à l’époque… et comme les siens, il offre son lot de passages un peu tirés par les cheveux. Par exemple, il n’y a guère de snipers sûrs de leur coup au moment d’abattre le pilote d’un Vampire en plein vol à deux kilomètres de distance (de l’autre côté du lac des Quatre Cantons)…
Outre les amateurs d’avions, ceux de voitures anciennes auront également leur dose. Une A110 en 1964 ? Oui, toute neuve !
Aux pinceaux, on retrouve Matthieu Durand, son trait reprenant les standards d’Uderzo. S’il manque un peu de souplesse sur certains personnages, le graphisme offre une subtile modernisation des scènes dynamiques et s’avère dans l’ensemble très réussi, bien soutenu par une mise en couleurs classique mais agréable de Ketty Formaggio. Nous nous permettrons du coup un reproche très spécifique : le dessinateur serait bien inspiré de mettre, un jour, l’œil dans une lunette de fusil de précision, pour avoir une vague idée de ce qu’on y voit lorsqu’on vise une cible à plus de dix mètres.
On peut regretter de croiser une nouvelle histoire d’espionnage autour de la vente de Mirage : cela ressemble un peu à une variation sur un thème imposé, qui s’insère dans la série à une période où Charlier utilisait déjà beaucoup cette trame, avec Mirage sur l’Orient et L’avion qui tuait ses pilotes, mais aussi Les anges bleus chez l’ami Buck Danny. Ceci dit, l’ensemble tourne bien, respecte scrupuleusement les canons de Tanguy et Laverdure, et nous attendons impatiemment le tome 4 qui devrait dénouer nombre d’éléments de scénario restés en suspens.
Franck Mée
48 pages, 24 x 32 cm, relié couverture cartonnée
Les albums de la série Tanguy et Laverdure Classic
Avec l’aimable autorisation des © Éditions Dargaud
Avec l’aimable autorisation des © Éditions Dargaud