Réédition
On est en droit de penser que si le souvenir de Gregory « Pappy » Boyington nous est parvenu, on le doit à la série télévisée qui relatait ses exploits dans le Pacifique. Mais on peut se poser la question simple de savoir pourquoi les producteurs ont choisi le pilote des Marines plutôt qu’un autre : tout simplement à cause de ce livre, publié en 1958 aux USA, et qui s’est aussitôt vendu à des quantités invraisemblables.
Car les Américains se sont alors souvenu de ce pilote revenu triomphalement du camp de prisonniers japonais où il se trouvait depuis vingt mois, pilote qu’on croyait mort et qui revenait récupérer la Médaille d’Honneur qu’on lui avait attribué à titre posthume. Il faut dire qu’avec plus d’une vingtaine de victoires aériennes, « Pappy » faisait partie des grands as de l’aviation américaine en guerre, et avait été largement médiatisé à l’époque. De plus, il traînait une réputation sulfureuse, mélange d’alcool et de bagarres qui ne laisse pas indifférent aux USA.
De retour des camps nippons, Boyington replongea dans ses mauvais démons. La parution de son livre lui permit de retrouver la gloire et les feux de la rampe.
De façon étonnante, ce livre, pourtant légendaire, n’avait jamais été traduit et publié en France, et il faut donc rendre justice aux Éditions Altipresse : c’est tout à leur honneur d’offrir enfin, 50 ans après la première publication, aux lecteurs francophones le livre de « Pappy ».
Une chose est sûre : Boyington n’a pas fait appel à un « nègre » pour rédiger ses mémoires. Son texte est brut, écrit au fil de sa pensée, émaillé de digressions. Au bout du compte, le pilote de chasse raconte assez peu ses combats contre les aviateurs japonais, mais n’hésite pas à confesser avec une honnêteté rare son combat contre l’alcoolisme, les conflits qu’il eut avec sa hiérarchie et ses nombreuses bagarres de bistrots.
C’est sans doute lorsqu’il évoque son abstinence forcée dans les camps japonais qu’il se révèle vraiment et qu’il montre son humanité ; ce sont là les pages les plus touchantes de ce livre.
Finalement, sans être un chef-d’œuvre de littérature, Tête brûlée constitue une rencontre intéressante avec un personnage de légende. Une évidence se fait jour au fur et à mesure des pages qui défilent : si l’on peut souvent reprocher à la télévision, et aux séries en particulier, d’exagérer fortement la réalité, dans le cas du « Pappy Boyington » incarné par Robert Conrad, on ne peut que souligner à quel point… la vérité dépassait la fiction !
Frédéric Marsaly
398 pages, format 15,5 x 24 cm, broché
Traduction par Yann Brindejont