Une biographie de marin français ayant servi comme observateur-bombardier dans une escadrille côtière entre 1917 et 1918 ne pouvait qu’attirer notre attention tant le sujet est rarement abordé. Sur les onze chapitres, seul le dernier concerne l’aviation, mais le titre est clair : il s’agit du parcours d’un marin originaire du Loiret, Robert Paillot, appelé pour son Service militaire dans la Marine en 1912.
Matelot (puis quartier-maître) charpentier, on le suit dans ses différentes affectations ; d’abord à Brest, à Saigon sur le Louxor, sur le Dupleix enfin à bord duquel il passe les premières années de guerre en Extrême-Orient et en Méditerranée, avant d’être versé dans l’Aviation maritime au début de 1917.
À la première approche, on constate le sérieux du travail effectué par l’auteur, petit-neveu de Robert Paillot, pour reconstituer la trajectoire de son grand-oncle. Mais la quantité d’informations prend vite l’allure d’un amoncellement de détails dont l’intérêt est souvent discutable. Une page entière pour lister les effets reçus par le matelot à son incorporation, c’est long ! Et de fait, si au début l’auteur tient son personnage, il s’égare vite dans des parenthèses historiques qui, si elles sont parfois nécessaires, auraient alors méritées d’être placées en bas de page. Mais que dire d’une description de la « station touristique » de La Baule (selon un « guide allemand » de 1908) avec le prix des chambres d’hôtels et les tarifs de chemin de fer (trois classes) entre Saint-Nazaire et Le Croisic, avec la durée du trajet !
En fait, l’auteur voulant sans doute en savoir plus sur l’ancêtre « remarquable » de la famille, a d’abord cherché pour lui-même. Qu’il ait ensuite voulu en faire profiter les autres est louable, mais il a perdu son bonhomme sous une compilation d’éléments puisés à diverses sources.
Était-il nécessaire de consacrer un paragraphe entier à l’histoire du CAM Saint-Raphaël depuis 1913 alors que Paillot n’y a passé qu’un mois en 1917 ? De même, l’auteur reprend le détail des activités du Centre d’aviation maritime américain du Croisic parce que celui-ci était proche géographiquement de l’escadrille V-484, alors que c’était une unité d’hydravions très différente dans son organisation, son fonctionnement et même dans ses missions.
De plus, outre quelques erreurs sans gravité (le pilote Noël Noël n’était pas le futur acteur comme indiqué p.171), les sources n’ont pas toujours été bien « digérées ». Celui qui connaît les publications consacrées au sujet les retrouve dans le texte (des tournures et expressions sont conservées). Il aurait été plus heureux d’utiliser les guillemets et d’indiquer les références en bas de pages.
Certes, le livre mérite d’exister. Il présente le parcours d’un marin comme il y en a eu quelques centaines seulement au cours de la guerre, et un lecteur non averti y apprendra beaucoup. Mais, sur la période qui nous intéresse, l’ensemble n’apporte finalement pas grand-chose de plus que les ouvrages de référence toujours disponibles et que peuvent posséder les connaisseurs. On peut donc se demander si l’éditeur n’aurait pas dû faire travailler davantage l’auteur, l’amener à réfléchir au public visé (passionnés de marine, passionnés d’aviation ou lectorat local). Le livre aurait été plus court, mais on y aurait gagné en intérêt pour le personnage.
Thierry Le Roy
200 pages, 16 x 22 cm, broché