Publication épuisée
Fayence doit être le plus grand centre de vol à voile en Europe, et peut-être au Monde. Ne serait-ce qu’à ce titre, cet aérodrome méritait largement qu’on en retrace l’histoire. Cela avait déjà été fait en partie dans une plaquette intitulée « 1935-1985, 50 ans d’aéronautique sur l’aérodrome de Fayences-Tourrettes » déjà bien agréable à l’époque. Un travail encore plus approfondi a permis à Yvon Dautruche et Roger Furst de nous présenter aujourd’hui cet ouvrage que l’on peut considérer, au choix, comme un livre en lui-même ou comme le 21e numéro du bulletin de la commission historique de la Fédération Française de Vol à Voile « Vieilles Plumes ».
Attention ! Ne vous-y trompez pas, et ne vous attardez pas à l’impression première que l’on peut avoir en l’ouvrant avant même de s’y plonger. On risquerait en effet de partir avec une petit a priori négatif car la finition, comme c’est l’habitude avec ces publications de la FFVV du fait des contraintes liées à de faibles tirages, n’en est pas la qualité première. Mais une fois de plus les apparences sont trompeuses, et le ramage de l’oiseau est bien plus beau que son plumage.
L’ouvrage est constitué de deux parties plus ou moins comparables en volume.
La première moitié est l’historique de la plateforme à proprement parler. Et même, au-delà de l’aérodrome de Tourrettes, c’est la naissance du vol à voile dans les deux bassins de Nice et de Cannes, et la convergence après de multiples expérimentations en d’autres lieux, de leur activité sur le terrain varois qui nous est racontée.
“50 ans de vol à voile sur la Côte d’Azur” nous promettait le sous-titre ; la promesse est tenue.
C’est bien sûr une chronologie présentée dans l’ordre du même métal, mais rendue vivante, car émaillée d’anecdotes et de quelques récits racontés par ceux qui les ont vécus, sans avoir la lourdeur de l’accumulation d’informations inutiles que l’on trouve trop souvent dans l’histoire aéronautique régionaliste. On y découvre bien sûr la mise en évidence de l’onde locale, qui a tant fait pour la renommée du lieu, et son utilisation pour les badges et les records, sans que ceux-ci à l’exception de quelques hauts faits d’armes nous soient listés ; c’en serait indigeste.
Les grandes périodes de cette histoire sont bien expliquées, ainsi que les écueils heureusement évités qui auraient pu conduire à l’extinction de l’activité, le déclassement de centre national à “simple” centre inter-club, ou ces projets d’extension du camp militaire voisin de Canjuers ou de réalisation par EDF d’une ligne à très haute tension sur les pentes de Seillans, projets avortés grâce aux efforts des responsables vélivoles locaux. Un petit regret ? C’est juste que tout cela ne nous est raconté que jusqu’en 1980, et on se prend à espérer, comme nous le font remarquer les auteurs, que la suite soit écrite un jour “quand ce sera de l’Histoire”.
Vous avouerais-je un de mes grands plaisirs au fil de cette lecture ? Avoir enfin appris qui était ce constructeur, Vuillemenot, dont les planeurs apparaissent au fil des chroniques d’autres grands centres (La Montagne Noire, St Auban, etc.) et qui était pour moi jusque là un mystère. Ah le clin d’œil à la presse locale racontant le baptême en 1931 d’un appareil par une marraine qui « brise la bouteille de champagne traditionnelle sur l’hélice du planeur »… !
Une des particularités de Fayence est son entremise très étroite avec le centre national de Saint-Auban, et donc la longue litanie des instructeurs professionnels tous plus connus les uns que les autres dans le Landerneau vélivole, qui ont fait la navette entre les deux “Mecque” du vol à voile, la plupart du temps parce que le club varois leur a mis le pied à l’étrier avant leur admission au centre national.
Les personnalités s’étant illustrées à Fayence furent célèbres aussi pour bien d’autres raisons, de Gianti et Allongue créant une exemplaire école départementale ou Charles Fauvel venant construire ses ailes volantes en voisin à Cannes, au clarinettiste Claude Luter en passant par les champions Barrois, Gerbaud et Ragot et tant d’autres …
La seconde partie est constituée d’annexes : récits plus complets d’aventures vélivoles à Fayence, listes et trombinoscopes des responsables et des moniteurs, courtes biographies, extraits du Livre d’or, tableaux de résultats, et enfin, outre les clichés illustrant le corps du récit, d’un cahier de photos dont on ne peut que vanter la pertinence et regretter la qualité.
Voici dont un ouvrage inévitable pour qui s’intéresse au vol à voile azuréen, ou à l’histoire de la discipline à plus grande échelle. Et bien entendu, pour tous ces stagiaires français ou étrangers qui migrent chaque année à Fayence comme atteints d’un trouble obsessionnel du comportement vélivole attendant leur ration de vols d’onde, une nouvelle forme du syndrome de Tourrettes…
Jean-Noël Violette
160 pages, 21 x 29,7 cm, broché couverture souple