En raison de sa situation géographique, la Corse joua un rôle stratégique de premier plan dans le déroulement de la Seconde Guerre mondiale, servant de tremplin à l’aviation américaine pour la libération d’une partie de l’Europe. Quatorze ans après la parution du remarqué U.S.S. Corsica, l’île porte-avions, Dominique Taddei nous revient avec ce que l’on peut considérer comme un indispensable tome 2. Il est bien connu que lorsqu’on publie un livre documentaire sur un sujet jusque là peu ou pas défriché, d’autres pistes s’ouvrent, d’autres angles d’approche se font jour. C’est vraisemblablement ce qui fut le cas pour ce We Corsicans pour lequel Dominique Taddei s’est adjoint Jean-Michel Casanova.
Tome 2 plutôt que simple complément, ce We Corsicans l’est à coup sûr. Par son volume d’une part (278 pages pour 236 à son prédécesseur), et par son contenu d’autre part. En effet, U.S.S. Corsica — et son sous-titre l’île porte-avions l’évoque clairement — était consacré au bombardement et faisait la part belle aux unités de B-25 Mitchell. We Corsicans ouvre la page à bien d’autres aspects de la présence US dans l’Île de Beauté, à commencer par la présence d’unités d’avions de chasse de l’USAAF, mais également d’appareils le l’US Navy participant à l’opération Anvil*, ou encore de commandos de l’OSS*. Foisonnant, cet ouvrage l’est de toute évidence, tant par la masse d’informations et par une iconographie abondante et inédite, que par la variété des sujets évoqués.
L’inventaire du contenu ressemble à une « Mission impossible » tant celui-ci est varié : trois pages en petits caractères étant nécessaires à l’appétissante table des matières, ce ne sont pas les quelques lignes d’un compte-rendu de lecture qui donneront le détail de la substance de ce livre. Sachez néanmoins qu’outre des renseignements sur les opérations, les auteurs ont mis l’accent sur les témoignages recueillis, lesquels comptent pour une bonne part dans l’intérêt que peut susciter cet ouvrage. Une foultitude de sujets variés sont évoqués : sauvetages en mer, présence de pilotes français du Lafayette (très bons pilotes bien élevés mais « fayots »), Tuskegee Airmen, nose arts*, loisirs, drames, relations parfois cordiales parfois difficiles auprès de la population (âpres discussions autour du prix demandé par certaines femmes corses pour les travaux de lessive)…
Cela valait vraiment la peine d’attendre plus d’une décennie, car le tandem Casanova-Taddei nous propose bien plus qu’un simple complément à U.S.S. Corsica, l’île porte-avions. Une iconographie d’une grande richesse, tant par le nombre de photographies (597) que par la variété des sujets, témoigne du fait que pendant ces quatorze années, les auteurs ne sont pas restés les bras croisés et qu’ils sont allés chercher le contenu de ce livre bien loin — aux USA — et avec une opiniâtreté certaine.
Philippe Ballarini
* Anvil / Dragoon : Débarquement allié en Provence, été 1944
* OSS : Office of Strategic Services : Services secrets US
* nose art = « art de nez » : sorte de « peinture de guerre » appliquée sur le nez des avions
278 pages, 24 x 32 cm, broché couverture à grands rabats
1,675 kg