Si vous pensiez que ce second volume allait clore la collection Zeppelin’s war, vous avez tout faux. Les scénarios de Richard Nolane ne sont pas un long fleuve tranquille, et il faudrait être la réincarnation de Jacques Bergier en personne pour deviner les événements qui nous sont relatés dans ce tome 2, Mission Raspoutine.
Certes, le volume 1 Les raiders de la nuit avait brossé le cadre de cette aventure fantasmagorique, qui fait apparaître (pendant une Première Guerre mondiale au cours modifié) Adolf Hitler, Georges Guynemer, Raspoutine… sous un jour fort particulier, enchevêtrés dans une étonnante histoire fantastique. Il faut ici prendre cet adjectif à son sens premier : une intrusion du surnaturel dans le réel, mélangeant l’invraisemblable au possible.
L’auto de Félix Youssoupov* : le prince y attend Raspoutine.
Un arrière-goût de steampunk.
On ne reviendra pas sur le talent d’auteur de Richard Nolane dans ce domaine où ses histoires, pour complètement extravagantes qu’elles soient, s’appuient toujours sur certains traits ou caractéristiques qu’il semble amplifier avec une loupe géante jusqu’à les rendre démesurés. Le mysticisme d’Hitler, celui de Raspoutine, le courage de Guynemer, la technique allemande, la médecine… tout cela sert de support à une histoire qu’il serait dommage de dévoiler, même par bribes.
Rappelons-nous simplement que Raspoutine a précédemment acquis une puissance magique extraordinaire au Spitzberg, qu’Hitler est commandant d’une sorte de « Super-Zeppelin » où il côtoie son ami Hermann Goering (devenu une sorte de « Baron rouge » à la place de Manfred von Richthofen), que Georges Guynemer a survécu à un terrible combat aérien mais qu’il n’est plus qu’un « homme-tronc » amputé des quatre membres… et au visage arraché. L’album Les raiders de la nuit plantait le décor de l’intrigue et mettait en place les personnages principaux. Mission Raspoutine est l’acte II de cette ébouriffante pièce de théâtre en plusieurs tableaux ; ici, Richard Nolane nous amène à Saint-Pétersbourg, au nord de l’Allemagne dans un centre de recherches, aux environs de Paris dans une sorte de clinique secrète où va se dérouler une expérience médicale « frankensteinienne », dans le glaciel ciel russe de la Baltique, près de Berlin, au QG berlinois de Hindenburg… Les appareils et véhicules sont conformes aux extravagances qui vont de pair avec ce scénario et Vicenç Villagrasa s’en donne à cœur joie avec, entre autres, un prototype d’une sorte d’Hyper-Zeppelin pour le moins ahurissant. Tout cela est mené tambour battant, puisque nous changeons de lieu en moyenne toutes les deux ou trois planches.
Dans le biplan rouge : l’Hauptmann Hermann Goering
Aux commandes du « Super-Zeppelin » expérimental : le Major Hermann Goering
Qualifier cette histoire de simple uchronie* serait réducteur et inexact. Il y a effectivement comme fondement à l’histoire un jeu d’histoire « alternative », mais la part du fantastique est importante. Il faut reconnaître que les personnages de Raspoutine, le starets mystique, Rudolf Hess le féru d’astrologie, Hitler, au regard halluciné, le tenant des théories de Hans Hörbiger… se prêtent bien à ce genre d’exercice. Ajoutons-y en France le docteur Cornelius, sorte de savant-fou-génial maîtrisant la « carnoplastie » et maîtrisant le « corps éthérique » et nous constaterons que dans la distribution des rôles, le scénariste a fait bon poids bonne mesure. Quant aux combats aériens, ils sont toujours aussi spectaculaires : Richard Nolane et Vicenç Villagrasa constituent décidément un tandem efficace.
Les Zeppelins, même s’ils sont redoutables et puissamment armés,
n’en sont pas moins gonflés à l’hydrogène, et donc particulièrement inflammables.
Amateurs du genre, vous allez vous régaler avec cet album palpitant, mais savourez-le bien lentement, car il se termine avec le fatidique « à suivre… » et il faudra vraisemblablement attendre environ une année pour connaître la suite.
Philippe Ballarini
* Le prince Youssoupov fut l’instigateur et le maître d’œuvre de la conjuration qui conduisit à l’assassinat de Raspoutine (authentique).
* Uchronie ou histoire alternative : histoire refaite logiquement telle qu’elle aurait pu se dérouler à partir d’un événement qui diffère de la réalité historique.
48 pages, 23,4 x 32,3 cm, relié couverture rigide
0,625 kg
Les albums de la collection Zeppelin’s war
Avec l’aimable autorisation des
© Éditions Soleil
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